Du sacre de Hamidou Diallo au massacre de Kaporo – Rails

Opinions

D’un exploit au cynisme électoraliste ethnique du pouvoir guinéen

Il existe deux Guinée, antinomiques, fort contrastées, voire ambivalentes :

— Celle de l’extérieur, « la 5e région » mêmement « la cinquième roue du magbana poussif » (SNBokoum), l’idyllique et la soyeuse, idéal type du bled tel qu’on voudrait qu’il fût ; mais trop    belle et fugace pour être crue, qui du reste berce doucereusement à coups de prouesses de nos compatriotes, de nostalgie et de mirifiques cartes postales. Sans même forcer le trait, cette première Guinée a le don d’élever les enfants du pays, inversement au mépris forcené que leur oppose le bercail. L’embonpoint et la réussite de la diaspora guinéenne n’ont jamais assez interpellé le pays interne quant à son impuissance, sa honte toute bue face à tant de compétences en friche, de savoirs et de savoir-faire laissés échapper.

Cette Guinée-là, la première, est celle de Hamidou Diallo, le fils d’immigrés guinéens dans l’Oklahoma, qui d’un dunk historique en s’élevant en homme-araignée (Spider man) ce soir-là dans le ciel américain, porté par la bénédiction de ses mânes du Fouta, au-dessus des 2 mètres 16 de l’homme-requin (shaqui O’neal), est entré dans la légende. Simultanément, les réseaux sociaux ont happé l’événement autour de la terre et immortalisé le geste.

Mais la Guinée du jeune prodige Hamidou Diallo est un mirage, un trompe-l’œil, une image d’Épinal. Elle n’existe guère, à vrai dire.

— Puis, il y a « le pays réel » (Pr Ansoumane Doré, Seigneur agrée l’ancien dans ton éternel djannah firdaus !). Celle-là ma foi c’est la Guinée de dedans à la face proéminente de sa catin d’État, le gros zinzin institutionnel et politique qui cumule toute la candeur, mère des vacheries les plus brutales ; la palpable, celle qui porte la fumisterie à son comble et donnerait raison aux anarchistes Bakoukhine et Proudhon. C’est malheureusement elle la vraie, la Guinée des injustices et son corollaire de laissés-pour-compte, son enclin au kitsch, au saccage et à la tuerie.

Celle-là même qui en ce moment mène les habitants de Kaporo-Rails ‘’en enfer à pied ‘’, pour la simple et bonne raison qu’ils sont Peuls, et représenteraient donc de ce fait de potentiels affidés de CDD.

La Guinée tout entière est une hérésie urbaine ; l’État s’échine tout de même à soi-disant normaliser les plans cadastraux et faire de l’aménagement territorial à la veille de chaque présidentielledans des zones ethniquement ciblées, depuis un certain temps.    « Mais où était l’État au moment de l’octroi de ces terrains, de l’aménagement, du lotissement, de la construction et des installations (…) ? »(Barry, 2014). Répondre, amen !

Kaporo – Rails reste jusqu’à date le levier politique interne, la bonne inquisition du pouvoir guinéen, depuis Lansana Conté, qui a valu à Ba Mamadou la taule.

Dans une perspective peu élucidée de 3e mandat, AC  s’engouffre dans une brèche politico-ethnique électoraliste entrouverte par Conté dont les ministres ont le temps de se fossiliser sous un pouvoir au tenant férocement combattu par eux naguère. Guinée des paradoxes, Guinée des deux poids, Guinée des tragédies, on n’y est jamais à une contradiction ou à une barbarie prés !

Depuis qu’on s’est fait à la diversion, au machiavélisme politique à force de destruction de biens et de vies humaines (Womey, Zowota, Zakariaou, et j’en passe, la liste est longue comme un jour sans pain) en art de gouvernance, les malheurs nous indiffèrent. Notre sens de la morale et du droit est altéré. Au risque d’avoir perdu notre humanité au change, l’autisme nous guette.

Le propre des dictatures africaines 0.2  c’est de distiller la mort et la désolation par à coups, par diversion en créant des ennemis intérieurs irréels, de sorte à anesthésier la communauté internationale et l’opinion nationale, ainsi annihiler toute velléité contestataire.

Pour le moment, seule une communauté semble concernée par les violences répétitives d’État, en Guinée. Mais, le vent tournera sans doute, et le vase débordera obligatoirement. Cours irréfragable de l’histoire…

 

P.S. — Article rédigé en urgence pour tenter de rattraper le cours supersonique des événements. Molière voudra bien être clément encore une fois. Avec toute ma gratitude renouvelée.

Oury Baldé

Cet écrit est également disponible sur l’amphigouri de Oury : https://www.facebook.com/www.lamphigourideoury/.


Titre intentionnellement prolixe.
 
 

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