Premièrement, sa peur de se retrouver dans la même situation parce qu’il a lui aussi commis le même genre de forfaiture que son ami en violant la loi fondamentale de son pays pour son troisième mandat.
Deuxièmement , sa crainte de voir arriver à la tête de la Guinée , ce traditionnel pays rival de la Côte d’Ivoire depuis la période coloniale, une équipe d’hommes et de femmes compétents , décidés cette fois à soigner le mal qui ronge la Guinée, la division, et à relever le défi du développement et de la modernisation de leur pays.
En effet le problème de la Côte d’Ivoire et de ces gouvernants successifs est de se trouver cerné par deux pays, le Ghana et la Guinée, qui ont des potentiels humains et des ressources minières nécessaires pour le dominer économiquement. ADO se trouve, contre toute attente, subitement privé de l’impulsif et « brouillon »de Conakry dont il était le conseiller économique, et dont la présence à la tête de la Guinée faisait bien l’affaire de la Côte d’Ivoire; comme hier Houphouet et Sékou Touré.
( « la politique africaine d’Houphouet » par Jacques Baulin).
Les guinéens doivent comprendre que la rivalité de leadership entre la Guinée et la Côte d’Ivoire date des années quarante, entre Yacine Diallo et Houphouet, lorsque les deux étaient députés à l’Assemblée nationale française. Chacun voulait tirer de la France l’avantage économique du combat politique pour son pays. Houphouêt-Boigny savait que le potentiel agricole , les ressources minières et hydrauliques privilégiaient la Guinée. Seuls la clairvoyance et le cynisme politique pourraient faire la différence. Malheureusement pour la Guinée, Yacine Diallo est subitement arraché à son peuple en 1954. Du côté guinéen la clairvoyance s’est subitement envolée. L’espace politique guinéen est désormais occupé par le cynisme , l’orgueil et la division. Le vieux baoulé en profite pour pousser ses pions en apportant son soutien à l’homme politique guinéen qu’il estimait le moins apte à la prospective, Sékou Touré. La suite nous la connaissons. Pendant que le guide de la révolution anéantissait l’élite de son pays dans des fosses communes, le vieux de Yamoussoukoro récupéraient des cadres guinéens qui s échappaient de la Guinée pour construire son pays et créer ainsi les bases pour son développement. La Côte d’Ivoire n’avait pas de cadres en ce temps là.
Lorsqu’aujourd’hui Alpha CONDÉ ou son premier ministre déclare rattraper la Côte d’Ivoire dans deux ans, cela amuse les ivoiriens et fait rigoler les guinéens, tant la différence de développement et d’infrastructures entre les deux pays est aujourd’hui abyssale.
Depuis bien longtemps les ivoiriens ont compris que « si les États sont égaux en droit, ils sont inégaux en puissance ». Cette puissance , seul le développement économique la procure aux Etats. C’est la raison pour laquelle la concurrence entre les pays est rude pour l’acquérir.
Il était en cela ridicule de s’enorgueillir d’avoir obtenu le PPTE; un programme d’assistanat, pour un pays qualifié de « scandale géologique ». Nous sommes dans un monde de concurrence rude dans lequel seuls comptent les intérêts des États. Les amitiés entre chefs d’Etat n’est que de façade. Hors jeu donc les pays dont les chefs d’Etat n’auraient pas compris cela. L’ancien directeur général adjoint du fonds monétaire international (FMI), Alassane Dramane Ouattara connait très bien ces rapports de force à l’international . Son ambition de faire de son pays la première puissance économique des anciens pays de l’AOF est donc tout à fait légitime. Le paradoxe c’est de voir le président du pays d’Houphouet Bobigny devenir conseiller économique de celui de Yacine Diallo. Ouattara n’ignore pas la formation trotskiste d’Alpha Condé. Les deux ne partagent pas les mêmes valeurs, ni politiques,ni économiques. L’intransigeance de ADO vis à vis de la nouvelle équipe dirigeante de la Guinée vise uniquement à maintenir à la tête de la Guinée un homme dont il connaît l’incompétence et la médiocrité. Ne dit-il pas en privé que « Alpha est brouillon »? ADO est en réalité dans la continuité de « la politique africaine »d’Houphouet-Boigny. Étouffer l’émergence économique des pays voisins en y créant l’instabilité ou en l’encourageant. Le Ghana a compris cela depuis longtemps. Il est temps que les guinéens se réveillent et comprennent que seule l’union fait la force. Le fait d’avoir un président de son ethnie n’a jamais fait le bonheur de cette ethnie là; mais juste celui de son entourage et de quelques opportunistes. Peu importe donc qui gouverne, l’important est qu’il développe la Guinée sans discrimination régionale, dans l’équité, le respect des lois communes et dans la concorde nationale.
Ansoumane Camara, Suisse